Cass. Soc., 11 mars 2025, n°23-16.415
Une salariée saisit le Conseil de prud’hommes en dénonçant des faits qu’elle qualifie de harcèlement moral. En l’occurrence, elle reprochait à son employeur d’avoir prononcé à son encontre un avertissement injustifié et de ne pas l’avoir interrogée sur la prise de ses congés payés.
La Cour d’appel constate que l’employeur n’apporte pas de justification sur ces deux éléments, mais déboute néanmoins la salariée de sa demande au motif que ces faits « ne relèvent pas du harcèlement moral en ce qu’ils n’ont pas eu pour effet de dégrader les conditions de travail de la salariée, ni d’altérer sa santé physique ».
Par un arrêt du 11 mars 2025 (Cass. Soc., 11 mars 2025, n°23-16.415), la Cour de cassation casse l’arrêt d’appel. Selon elle, les juges du fond doivent tirer les conséquences de leurs constatations lorsqu’ils relèvent l’absence de justification par l’employeur des éléments laissant supposer une situation de harcèlement moral.
Aussi, si les juges du fond apprécient souverainement si le salarié établit des faits qui permettent de présumer l’existence d’un harcèlement et si l’employeur prouve que les agissements invoqués sont étrangers à tout harcèlement, il importe peu que ces agissements aient eu un effet concret sur les conditions de travail ou la santé du salarié.
La Cour de cassation semble ainsi considérer que le harcèlement moral peut être caractérisé même lorsque celui n’a pas pour effet une dégradation des conditions de travail.
Cet arrêt semble faire écho à une décision du 14 janvier 2014 au sein de laquelle la chambre criminelle de la Cour de cassation avait déjà pu retenir que « la simple possibilité d’une telle dégradation suffit à consommer le délit de harcèlement moral », sans pour autant que la dégradation des conditions de travail n’ait à être avérée.
Ici, la Cour n’évoque même pas une telle possibilité.
Or, pour mémoire, l’article L.1152-1 du Code du travail définit le harcèlement moral en ces termes : « Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. »
Pour autant, la Cour de cassation ne relève pas cette précision du texte, et ne fait référence ni à « l’objet » ni à « l’effet » des agissements de l’employeur pour caractériser le harcèlement moral, se contentant de viser les éléments de faits apportés par la salariée et l’absence d’éléments objectifs de l’employeur permettant de les justifier.